Quel vertige singulier et quelle magnificence d'entrevoir ce que traverse le monde à chaque fraction de seconde. La vision s'élargit chaque jour, les sens s'ouvrent afin de percevoir ce qui n'était encore perçu et vu le jour d'avant.
Jusqu'où irons nous ?
La vie, nul ne l'a jamais vue, c'est le corps qui nous la fait connaître. Nous sommes traversés et invités à voir chaque fois à travers et donc au-delà de nos portails sensitifs reliés à un moi devenu trop étroit pour contenir l'ensemble. Pourrions-nous laisser la Vie qui se donne à chaque instant chambouler nos points de vue ? Pourrions-nous La laisser se manifester, La rendre visible et palpable sans La mettre "en état d'arrestation" ? Oserions nous laisser chaque étoile du ciel ouvrir l'entre-ouvert en nous afin d'advenir à l'ouvert de l'Être ?
Quand l'oeil du coeur oeuvre dans notre quotidien, inspiré qu'il est de toute éternité à recevoir et être le médiateur sans jugement entre l'invisible et le visible, nous sommes alors à même d'appréhender et d'accueillir le cycle inépuisable de la lumière et de l'ombre impulsé par le mouvement soli-lunaire. Dès lors les manifestations multiples et tangibles sur notre planète ne ré-activent pas le moi, elles passent, circulent et s'offrent à la transparence du coeur. Nous sommes dans un passage singulier où les multiples illusions projetées d'un monde meilleur s'effondrent et se dissolvent dans le réel perçu par nos sens d'aujourd'hui. Elles disparaissent les unes après les autres dans les flammes du feu, touchées par la sècheresse des terres et des coeurs, inondées par les torrents d'eau qui se déversent ici et là, bousculées par la puissance du vent, porteur tout à la fois de destruction et messager du renouveau. Et en même temps, dans cet espace intérieur, intime, se dévoile et se présente déjà sur le seuil, la lueur d'un état neuf qui stimule et inspire via notre être co-créateur, le fil ardent et lumineux du vivant. Merveilleux processus de transcendance, qui nous permet dans l'abandon de l'agir sur et dans la grande scène du monde, de traverser l'impuissance. D'ici, la possibilité d'un dépassement, d'un seuil franchi collectivement, infuse en nous un tout autre ordre, une autre vision de la relation entre le singulier, le pluriel et le Tout. Ici les mots et représentations anciennes disparaissent telles les feuilles mortes qui se déposent en virevoltant en cette saison appelée automne.
Et oh miracle ... de ce tapis de feuilles, un nouvel humus se créée en silence !
Au coeur de ce profond mystère, ce qui semble en émergence, à naître et à grandir serait une pensée humaine investie et illuminée par l'oeil du coeur. Regards bénis portés sur le monde, nous permettant de revenir à notre état naturel de non séparation où la gratitude et le soin au Vivant emplit chacun de nos souffles et inspire nos actions. Magie d'une réouverture progressive à cette conscience cosmique solidaire entre et avec tous les règnes qui nous fonde de toute éternité. La bonne nouvelle est cet engendrement silencieux et invisible qui se prépare via la puissance de la pensée et du langage créateur.
Nous savons à quel point la pensée est créatrice. Nous sommes parvenus collectivement à co-créer et matérialiser ce dont nous avons besoin pour expérimenter et valider notre capacité à nous libérer des contraintes matérielles et temporelles et agir ensuite sur elles ... Nous savons que nous sommes libres bien au-delà de ce que nous croyons et le moment est propice pour dépasser les "savoirs" et entrer dans la parole investie par nos actes. Ainsi, nous avons créé le décor parfait et invité l'expérience dans nos vies pour incarner la suite ... C'est en effet par nos pensées et actions quotidiennes, dans l'invisible et au coeur d'un "apparent" silence que l'oeuvre se poursuit. N'ayons crainte de chevaucher la Lune, d'accueillir ce qui meurt et se dissout et soyons attentifs aux multiples miroirs et illusions de la belle dame argentée. C'est dans la profondeur de l'intime que se libèrent les voies verrouillées par le secret de nos expériences sans témoins. Et c'est parfois dans un profond dénuement que nous découvrons avec émerveillement que ce à quoi nous aspirons le plus ardemment est en réalité blotti au creux de nôtre être, tout simplement. De là, ôter, dépouiller et libérer ce qui fait obstacle à l'intime nous ouvre à l'espace immense et libre qui demeure au fond de nous, à cette trame invisible où nous sommes déjà reliés au monde et à l'Humanité.
Je vous souhaite de merveilleux silences, des partages féconds et un automne lumineux et inspirant.